Afghanistan, le doute saisit l'Occident
Par Olivier Kempf le mercredi 24 février 2010, 09:06 - Afghanistan - Lien permanent
Je suis donc (comme annoncé ici) passé hier sur France 24, interrogé par Gauthier Rybinski. L'excellent Charles m'a grillé la politesse et s'est dépéché de le publier sur la toute nouvelle AGS TV.
Vous pouvez le visionner directement sur France 24 (excellente chaine au demeurant, la BBC World à la française).
Et puis vous pouvez aussi le lire directement ici sur you tube
J'y dis que la guerre n'est pas forcément perdue, que l'Occident a une vision toujours supérieure (ces barbares ont le droit de tuer, nous n'avons pas le droit de faire des bavures), que les deux opinions publiques sont la cible de chacun des belligérants (non, je n'ai pas prononcé le nom de Clausewitz, mais je l'ai pensé très fort), ...
La quart d'heure de gloire warholien est donc rempli... Il y a même un type, à la cantine, qui m'a dit "mais vous êtes passé hier sur France 24" : encore un lecteur d'égéa .... super physionomiste, car se souvenant du gars qui causait dans le poste.....
Quoi qu'il en soit, et où que vous le regardiez, si vous pouviez mettre vos commentaires sous ce billet...
O. Kempf
Commentaires
Cela fait un peu bizarre de vous voir et vous entendre. EGEA a maintenant un visage :), c'est très agréable.
J'ai beaucoup aimé la franchise : c'est une guerre, avec tout ce que cela implique...
J'ai aussi senti (mais je me trompe peut être) une petite pensée sous jacente par rapport aux rapports "dommages collatéraux"/"attentats" : certains médias insistent lourdement sur nos erreurs et parfois peu sur les attentats de nos ennemis.
egea :ben oui>>. >>Si c'est une guerre, il faut dire tout ce qui va avec, et donc décrypter l'ennemi, sans forcément le déprécier, ni le magnifier
Bonjour,
je ne suis pas convaincu par l'argument "il faut reprocher aux talibans leurs modes opératoires et leur dire si vous faites la guerre ne massacrez pas des populations...". Certes la bataille pour l'opinion publique doit probablement nous inciter à être plus incisif dans ce domaine. Mais le problème est, à mon sens, que personne dans l'opinion publique "occidentale" ne songe vraiment à reprocher aux talibans d'être...des talibans, avec les modes d'actions qu'on attend d'un taliban! Cela nous semble naturel, parce qu'ils nous sont désignés comme des terroristes, parce qu'ils utilisent les "outils" de la guerre irrégulière,...
Par ailleurs, comment faire passer ce message pour qu'il soit "audible" dans l'opinion publique occidentale : communiqués? vidéos "choc"?...Il faudra à nos stratèges en communication bcp d'imagination pour toucher puis convaincre nos opinions.
cordialement,
égéa : vous avez raison : l'inconvénient du direct, c'est qu'on simplifie... Mais au fond, rappeler que ce sont des barbares, voire des "sauvages"; Mots compliqués à employer, puisque depuis des années on relativise et on homogénéise toute les cultures civilisations. Bref, on a du mal aujourd'hui à tenir un discours sur les valeurs sans courir le risque d'être ringard, néo-... krypto jules-ferryste, etc...
Quelle surprise de vous voir en direct sur France 24 alors que je me trouvais devant une télé du camp de Warehouse à Kaboul ! Actuellement en OMLT entre provinces de Surobi et Kapissa, j'ai suivi avec attention vos propos. En ce qui concerne ma vision du conflit, c'est un peu comme la légendaire comparaison de l'aiguille à localiser dans la botte de foin, ou la mission consiste saisir l'aiguille sans toucher le foin, ... et sans se piquer ! Nous y parvenons difficilement à mon sens. Quel bénéfice net au terme de nos meurtrières opérations de fond de vallées ? Je suis de moins en moins certain de trouver une véritable voie de sortie de guerre en la menant de cette manière face aux talibans. Alors que nous sommes fixés sur la plupart des emprises françaises en Kapissa, l'ANA a bien du mal a s'épanouir en les forçant à reproduire nos méthodes. Cependant, il ne faut pas baisser les armes mais les mettre en appui d'une action plus politique et économique. A suivre ...
Chancelades Pierre-Yves
Bonsoir, j'ai beaucoup apprécié votre propos, à la fois juste et pédagogique. Votre idée la plus importante à mon sens est celle du temps. Mais il en est une autre au moins aussi importante qui mériterait un long travail de pédagogie autour de la notion d'ennemi... Mais il vous aurait fallu plus de 10 minutes pour la traiter.
En tous cas bravo pour votre intervention.
Cordialement
CR
égéa : merci. J'ai déjà évoqué dans égéa la chronostratégie..;
@eric_arbras:
si cela vous semble naturel que les talibans utilisent les moyens de la guerre irrégulière "massacrer des populations" "faire exploser des avions" parce que c'est leur nature, alors il devrait pouvoir sembler naturel de s'en protéger puisqu'il est dans notre nature d'humains, normalement, de nous protéger des dangers et de répliquer lorsqu'on est attaqué. Ils ont attaqué le 11 sept.Depuis, on réplique...
Votre propos illustre bien celui de M.Kempf: l'opinion trouve aujourd'hui normal que les talibans et les terroristes en général fassent exploser des bombes sur les marchés ou dans les files d'attente des commissariats. Ils font ce qu'ils veulent, ils sont chez eux. A la limite, l'opinion veut bien accepter que nous,occidentaux, intervenions si et seulement si les conditions suivantes sont réunies:
1) aucun soldat occidental ne meurt
2) cela ne nous coûtera pas un sou,surtout en période de crise
3) nos armées ne commettent aucune bavure, ne tuent personne, se comportent aussi amicalement que des assistantes sociales
4) ce n'est pas une ancienne colonie afin de pas réveiller les démons colonialistes
5) tous les journalistes constatent que chaque autochtone accueille les militaires occidentaux comme des être divins, avec guirlandes de fleurs et concert de musique locale.
bref, on exige que l'action militaire occidentale soit aussi miraculeuse que l'action divine. Autrement dit, l'opinion occidentale veut bien consentir à régler le problème afghan si cela se fait par l'action du Saint-Esprit. M.Kempf a été gentil, il a parlé de supériorité, un peu comme de la condescendance. Moi j'appellerai cela plutôt une manière de chercher toutes les raisons de ne pas aller se battre: de la couardise.